Et maintenant, je suis ici :

dimanche 6 décembre 2009

Nouvelle-Zelande !

Après un semestre en Inde, qui a comporté autant de rencontres passionnantes que de galères diverses, voici le moment tant attendu d'aller respirer un mois dans le pays le plus vide du monde - si ce n'est sa population de moutons (non, ce n'est pas juste un stéréotype, c'est véridique) qui aura un poids démocratique énorme le jour ou elle obtiendra le droit de vote, -la Nouvelle-Zélande. Faire les dernières courses dans l'urgence, soigner mon pied, boucler mes bagages, aller en rickshaw à l'aéroport et... rater mon avion. Ca commence mal. Tout ça pour avoir attendu Piyush à la fac pour pouvoir lui dire au revoir. "Ne jamais attendre un garçon". Je devrais écouter Marine plus souvent.

Les adieux se firent donc en deux fois, la première fois pour de faux, mais on y croyait. C'était facile avec Marine, grandes étreintes et adieux exubérants, tant pis pour les Indiens qui regardent. C'était beaucoup plus difficile avec Piyush : que dire, quoi faire pour se dire au revoir quand on ne peut ni s'étreindre ni s'embrasser ? Sourires gênés, corps qui s'inclinent. On sent tous les regards autour, cette censure permanente. Une étreinte, quand même, tant pis pour eux, et son visage tout près du mien. Mais c'était pour de faux. Je n'ai pas pu prendre mon avion, c'était trop tard, "check-in closed". Angoisse, panique qui monte a la gorge, empourpre les joues, rend la voix suraiguë. Solution finalement trouvée - je vous passe les longues négociations - avec une "négligeable" amende de 2000 roupies plus une attente de 6 heures dans l'aéroport. Mais j'ai pu garder mes correspondances, ce qui veut dire que je suis arrivée à temps en Nouvelle-Zélande. Deuxième adieu, tout aussi endormi, tout aussi maladroit. Gentille hôtesse désespérément à la recherche d'une place pour Dubai (ma première destination). Gentils Américains à destination de Christchurch aussi, mais encore plus en panade que moi : ils avaient mal lu les directives du service d'immigration kiwi et n'étaient pas en règle...

Dubai. Pas de chiottes en or, déception. Au moins, tout est propre, bien plus qu'à Delhi. Petite toilette méthodique en vue des longues heures de voyage encore a venir. Découverte : un parfum peut être unisexe. Je n'ai aucune idée de la valeur de la monnaie ici ni même de son nom, alors j'évite d'acheter quoi que ce soit dans les duty-free. Est-ce que tous les Kiwis sont aussi grands, aussi blancs, avec un accent aussi prononcé ?

Voila ça y est. Je ne sais pas combien d'heures après - compter les heures en remontant puis en descendant le temps ça me dépasse complètement - me voila arrivée. Je guette Auckland par les hublots de l'autre côté des rangées de sièges. La ville apparaît dans une lumière rosée, baignée de Pacifique, cernée par des collines vertes et pures. Bizarre sensation de calme et d'angoisse à la fois, que je ne comprendrai que plus tard. Récuperer mes bagages, changer mes roupies en dollars néo-zélandais, me re-faire un brin de toilette, manger un morceau. McDo en pensant a Marine : certes les hamburgers sont au boeuf, mais la sauce est dégueu, et les frites sont pas cuites. Long live the Indian Chicken Maharaja Mac. Je me sens totalement hors contexte dans mes vêtements indiens, qui ont au moins eu le mérite d'être confortables pendant ce voyage inhumainement long. J'adore le look des "locaux", on se croirait perpétuellement à la plage. Je n'ose pas imaginer le regard des Indiens sur des femmes aussi court-vêtues. Je retrouve une société policée, des sourires très polis voire gratuitement amicaux, des employés utilisant des expressions incongrues du genre "Hi there how are you ?" et finissant même par "You're welcome, take care !". Foule compacte mais pas menaçante de Blancs très blancs, et de visages aux traits nettement maoris. Et le vent qui porte les embruns marins s'engouffre à travers les portes battantes de l'aéroport. La mer. L'horizon. Tout ce qui me manque à Delhi. Et soudain je comprends l'impression étrange de tout a l'heure.

Je suis désadaptée. Dans ce pays développé qui ressemble en beaucoup de points à la France, je ne sais pas comment me comporter. Des rues larges et pas envahies, une signalisation bien entretenue, une courtoisie omniprésente, cette paix, partout, et ce vent qui me serre la gorge. Propre, net, rassurant, lumineux, aéré. Comment je fais pour me repérer ? Personne ne me dévisage obstinément, et si par hasard je croise un regard, la personne me sourit, gentiment. Pour la première fois depuis des mois la sensation de devoir contrôler mes gestes à chaque seconde s'évacue, et laisse place à du vide, seulement. Un grand vide comme l'appel de la mer. Un sentiment de vide béant, presque comme une plaie, qui ne demande qu'à être empli par tout ce que je devine là, juste à l'extérieur de l'aéroport, dans lequel je suis encore enfermée. Cocon. Le dedans est moins vide que le dehors. Plus qu'un petit vol et je suis arrivée. Loreena McKennitt dans les oreilles, sa voix claire et plaintive.

"Cast your eyes on the ocean, cast your soul to the sea

When the dark night seems endless, please remember me"

1 commentaire:

  1. Wouh, ça commence bien ce périple kiwi!
    Tu transmettras mes plus grandes amitiés à Fabien, et puis toi... ben j't'embrasse!!

    (mon passeport avec le fameux visa arrive aux alentours du 22 décembre...)

    RépondreSupprimer