Et maintenant, je suis ici :

samedi 5 septembre 2009

Explorations (in-)hospitalières

En rêve, je suis quelqu'un qui profite de son séjour en Inde pour explorer *tous* les aspects de la vie ici, sans exception et sans préjugé. DE FAIT, je me devais d'explorer le système hospitalier indien. Et pour ce faire, quoi de mieux qu'une incursion dans un hôpital ? Bien sûr, cela requiert un certain déguisement et une stratégie évoluée. Alors, pour vous mes chers amis lecteurs et lectrices, une infection et des douleurs passablement insupportables plus tard, je me suis introduite dans le système par la petite porte, un petit health center à la fac, pour aboutir à un bâtiment beaucoup plus important, un grand hôpital privé. Laissez-moi vous faire le récit de ma mission (accomplie).

Tout a commencé (peut-être), par un plat chinois consommé dans une petite canteen sur le campus, et qui peut avoir été l'origine, la source, l'épicentre du séisme qui a secoué ma vie ces derniers jours. Hum... ou quelque chose de plus nuancé. Quoi qu'il en soit, la douleur a assez logiquement commencé dans l'abdomen. Après une nuit blanche et une journée noire, ça allait mieux, jusqu'à ce que dans la nuit suivante la douleur atteigne les reins et m'empêche à nouveau de dormir. Une journée de fac a suivi anyway, quelques cours intéressants, une rencontre vraiment génialissime avec une Japonaise étudiante à la JNU, une première incursion dans l'univers de la bibliothèque poussiéreuse (mais néanmoins prestigieuse - et ça rime) de la fac avec une de mes colocs, une énième tentative avortée pour m'inscrire dans cette même bibliothèque... (je ne livrerai pas ici mes états d'âme administratifs ;) ) C'est au moment de partir de la fac, en parcourant à pieds la longue route goudronnée qui conduit à la main gate du campus, que mon vrai plan d'action a commencé. La douleur cette fois dans la poitrine m'empêchait de marcher, et en quelques secondes j'ai été entourée d'Indiens empressés, tous, sans le savoir, étant des agents dormants, indispensables à la réalisation de mon plan. "You think you can seat on a bike ?" "Euh... là tout de suite... nan..." Finalement, ce sera une voiture qui m'emmènera au health center de la fac. Première étape. Je n'ai malheureusement pas été très conscienscieuse dans ma tâche d'observation des locaux, rapport sans doute aux deux doses d'antidouleur qu'ils m'ont fichées dans les deux épaules - j'avais vaguement l'impression d'être un de ces éléphants chassés par des méchants adeptes du safari barbare, descendus au fusil à pompe. Examen sommaire, quelques questions dans un anglais approximatif. "The ambulance is coming". Ahahah. M'en fous, je plane. J'ai eu la chance dingue d'être avec ma coloc Justine quand tout ça est arrivé, et en plus on a croisé un bon ami à ce moment-là, qui est aussi venu avec moi. Bref, l'ambulance a fini par arriver, et c'est là que mon boulot d'observatrice-analyste a repris : une jeep toute cabossée avec le logo de JNU, dans laquelle ont aussi embarqué des étudiants censés aller se soumettre à un test swine flu.

Tuduuuum. Vous êtes arrivée au paradis. Vous préférez un steak ou un plat de lasagnes ? Clignement d'yeux, tension d'oreille. Non, raté, c'est pas encore le paradis, c'est juste "Holy Angels Hospital". Flou artistique où j'ai encore failli à ma mission. Un oeil entrouvert seulement, pour voir les salles d'attente à peu près propres, le cabinet de consultation, la petite croix en or au cou des infirmières apparemment sélectionnées entre autres sur des critères physiques. En bref, un grand flou pendant plusieurs heures, vu que les Anges Sacrés m'ont aussi ajouté des doses d'antidouleur, autant dire que j'étais loin, très loin, presque au niveau du snack du paradis qui sert du steak et des lasagnes. Des radios, des prélèvements, pas grand chose d'intéressant. Dommage par contre que je n'aie pas eu d'appareil photo pour immortaliser la blouse immense, un peu dégueu, aux carreaux vichy rouges et blancs, dont on m'a revêtue pour les radios, et pour prendre aussi l'appareil lui-même, produisant une étrange impression de vétusteté et de futurisme. Piqué à Dark Vador ou alors racheté au marché noir après la chute de l'URSS, suggestion de ma coloc. Le soir même, encore blindée d'antidouleurs, et sans grande information sur ce que j'avais, je quittais donc les Holy Angels pour mon petit chez moi, avec des médocs donnés au compte-gouttes (pas de gaspillage comme chez nous... A suggérer aux pharmacies françaises ?) et un rendez-vous le lendemain avec un médecin sympa, anglophone, à lunettes ovales. J'aime bien les lunettes ovales.

Le lendemain bien sûr c'était pire, sans parler de la nuit. Back to the Holy Angels ! Vous croyez que je pourrai avoir des lasagnes cette fois ? Même pas. Damned. La meilleure partie, ç'a été le trajet en rickshaw avec mon autre coloc, Marine, en pleins embouteillages, en pleine chaleur aussi, pour aller à l'hosto ! Je mérite une médaille du nouveau combattant pour ça, sans blague. Le Vietnam c'est rien à côté. J'ai été immédiatement hospitalisée, mais avec toujours la présence rassurante de Marine à mes côtés. Au bout d'un moment, elle m'a collé mon portable sur l'oreille, et j'ai vaguement entendu que j'allais être transférée dans un autre hôpital, avec lequel mon assurance a des accords et surtout... qui est plus réputé, plus propre, plus cher, plus pour moi quoi, Blanche que je suis. Et puis je me suis dit, chouette alors, une chance d'explorer une plus grande marge des hôpitaux indiens !

Nouveau trajet en ambulance, mais une vraie cette fois. Marine m'assure que ça n'a pas duré cinq minutes, mais pour moi ça a duré une éternité. Assez longtemps au moins pour remarquer que ces infirmiers-là, leur blouse bleue et blanche est impeccable, et qu'ils parlent un anglais plus que correct. "Pain in the chest ? - No no ça va là, je vais bronzer un peu sur la plage, par contre j'aimerais vraiment bien manger des lasagnes..." Youpyoup, Fortis Hospital, hôpital de luxe, tout pimpant, tout neuf, tout sikh. Là encore, un grand flou dans la succession des événements. Quelques tests encore, censés être plus précis que les précédents, puis une chambre rien qu'à moi, avec un lit bien confortable, une télé, un canapé, une grande salle de bains où le moindre grain de poussière sur le carrelage serait une insulte au génie du ménage (les Hindous doivent bien avoir un dieu rien que pour la poussière ou pour le ménage, il faudra que je checke). Un défilé de médecins et d'infirmières portant tous un masque "contre" la grippe porcine. Entre nous soit dit, c'est assez marrant un masque sur une tête barbue portant turban.

J'ai dû rester pour la nuit, Marine est restée avec moi, et j'ai eu aussi la longue visite d'un ami indien, real blessing. Les résultats sont arrivés le lendemain, toutes les radios et les tests étaient normaux, ils ont trouvé seulement une infection, mais ça merci je m'en doutais ! Je devrai donc me contenter, comme diagnostic, de "Acute viral illness with gastritis". Je trouve ça super glamour !

J'ai eu le temps de savourer quelques éléments particulièrement intéressants :
- Un test swine flu effectué par une espèce d'infirmier qui a enfilé son équipement spécial (combi, avec capuche, machins à mettre par dessus les chaussures, masque, lunettes, gants) APRES être entré dans ma chambre (j'offre un voyage sur Mars en montgolfière à celui qui me démontre que non, ce n'est pas débile).
- Un régime alimentaire particulièrement recherché : non pas un, ni deux, ni trois, ni quatre... (bon j'arrête !) ...mais bien NEUF repas par jour. D'abord, le petit déj', un peu de thé d'Assam, mini tartines de beurre et deux trucs dont je ne veux savoir ni le nom ni la provenance. Puis, une banane. Puis, une bolinette (un petit bol) de soupe. Puis, le dîner (sans sel). Puis, le thé. Puis, une bolinette de soupe. Après, je sais pas, j'ai déserté.
- Une vraie douche à l'eau CHAUDE. Ma première depuis que je suis arrivée en Inde ! Et là, sans rire, j'ai adoré.
- Une télévision avec des centaines de chaînes à Indiens. De la pub pour Indiens, des clips pour Indiens, des soap operas pour Indiens... Moi qui trouve ça plutôt savoureux, c'est devenu carrément écoeurant. Je suis devenue reine de la zapette (que j'ai bloquée 3 fois, c'était rigolo de faire revenir le technicien à chaque fois). Pour le plaisir, petite sélection rien que pour vous, récupérée péniblement sur Youtube :
* http://www.youtube.com/watch?v=dBc_gm5ci2E : Hrithik Rochan et ses mouvements psychédéliques.
* http://www.youtube.com/watch?v=F5W37ter-vg : un Tom et Jerry comme quand j'étais petite !!
...Et beaucoup d'autres que j'aurai peut-être l'énergie de chercher demain.

Pour finir, j'ai dû bagarrer un peu pour sortir parce qu'ils voulaient me garder un jour de plus, mais finally, j'ai eu trop envie de respirer l'air libre (et si frais à Delhi). J'suis allée fêter ça en allant manger italien, peu importe le prix, tomates mozza, gnocchi, tiramisu, avec un tel plaisir, presque de l'euphorie, de me sentir aussi bien et de manger de la nourriture-presque-italienne-servie-par-des-Chinois. Bilan de mon exploration ? Positif. Et loin des stéréotypes sur la médecine du "Tiers-Monde". Il faut dire aussi que je n'étais pas dans un hôpital pour le commun des Indiens... Enfin bref, je vais très bien, et je remercie tous ceux qui m'ont entourée, surtout mes colocs =) Dodo now, moi récupérer et repartir en explorations - un peu plus touristiques - demain. Ou alors rédiger mes tutorials.

4 commentaires:

  1. Don't worry : je veille sur toi. Comme tu l'as parfaitement compris, ces modestes épreuves ne visaient qu'à te permettre de découvrir de nouveaux aspects de ce pays si surprenant.

    PS :(Prends soin de toi quand même !!!)

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  2. et ta vieille mère elle t'a pas entourée comme tu dis ????????????

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  3. ma chérie, je trouve que tu as l'air amaigrie sur cette photo et je te trouve très fatiguée également, fais attention à toi et pense à te reposer !

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  4. La pharmacie française a entendu ton message lol.
    Cette année je serai de l'autre côté du mur, c'est à dire dans le rôle du pharmacien qui vient te rendre visite dans ta chambre à l'hopital.
    Prend soin de toi Gaelle.
    A bientot.

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