Et maintenant, je suis ici :

dimanche 14 mars 2010

मुंबई (Mumbai)

Avant de venir en Inde, pleine de préjugés bien que m'en défendant, je m'étais fait plus ou moins la promesse de ne jamais aller à Mumbai, la tête résonant encore de titres chocs dans les journaux après les attentats du 26 novembre 2008, d'images de pauvreté extrême prises dans "Slumdog Millionnaire" ou même simplement nées de l'expression "Mumbai abrite le plus grand bidonville d'Asie". Après quelques mois en Inde, finalement, j'ai appris que Mumbai, c'est loin de n'être que ça, et que même les Delhites jalousent le niveau de vie, le rayonnement culturel et l'urbanisme de Mumbai. Et donc, finalement, nous voilà avec Adrien et Marine sur la route (aérienne !) de Mumbai - ça commence bien, on s'est plantés d'aéroport et on a failli louper notre avion.


A l'arrivée, "Good morniiiiiiing Mumbai" pour faire plaisir à Marine (et à tout le monde après avoir vu "Munna Bhai"), c'est l'aventure attendue. Les embouteillages en périphérie sont monstrueux, il nous faut bien 2h30 pour rejoindre le centre, et là il est très difficile de trouver une chambre, et les prix sont exorbitants par rapport au reste de l'Inde. La longue errance en rickshaw nous aura au moins permis de voir un peu de la ville, avec un parcours cahotique en boucles rondes qui s'enchaînent - diabolique. Finalement nous trouvons une chambre excellemment située, à une rue du Taj Hotel (le luxueusement et tristement fameux à la fois) pour le modique prix de 1000 roupies. Le premier jour est occupé à se balader au hasard, malgré la fatigue du voyage en avion à quatre heures du matin, depuis la façade maritime de Colaba, le quartier où trône le Taj Hotel, jusqu'aux quartiers d'architecture anglaise, Police Headquarters (paraît que c'est interdit de prendre des photos, m'en fous, j'ai réussi à en prendre une avant de me faire virer), University of Mumbai (pas moyen de rentrer non plus, même en disant qu'on est étudiants à Delhi...). Je retrouve le plaisir de me promener dans une ville, plaisir depuis longtemps perdu à Delhi. Ici, les rues sont propres, fleuries, les allées plantées de palmiers, les trottoirs sont impeccables (et ne sont pas des pièges pour chaque pas que moi, pauvre créature maladroite, effectue). Quand il faut se déplacer autrement qu'à pied, ce qui arrive souvent vu le gigantisme de la ville, on prend un de ces taxis noirs à la suspension d'un autre temps, où le chauffeur aussi perdu que nous dans cette ville tentaculaire met le compteur sans rechigner - j'aime cette ville.


Le deuxième jour, Adrien et Marine partent pour la journée, voir la Victoria Station et se balader sur Marina drive (Marine s'y déclare chez elle), mais moi je ne peux pas sortir de la chambre d'hôtel, prisonnière de ce tutorial pour lequel je suis déjà en retard, il faut le finir et l'envoyer, mais j'ai mal à la tête sous le ventilateur dans cette chambre finalement exiguë. Par chance, si je sors la tête par la fenêtre et que je me tords le cou vers la droite, j'aperçois les toits ouvragés du Taj, et je fais face à la mer et à ses flots couleur d'ardoise.

Le troisième jour, virée en bateau ! Bon, c'est un peu
moins excitant et l'eau est un peu moins turquoise qu'en Nouvelle-Zélande (rappelle-toi Gaëlle, comparer, c'est mal). En fait, l'air est tellement pollué qu'on ne voit pas la ligne d'horizon, tout se mélange dans un triste fondu gris ! Et puis le bateau, bon, il y a de bonnes chances qu'il ne respecte aucune norme. Et y'a même pas de canots de sauvetage, argh. Mais passons. La destination visée est beaucoup plus excitante, elle : l'île d'Elephanta, ainsi nommée (je cite le Lonely Planet) parce que les Portugais à leur arrivée y auraient découvert une statue d'éléphant. Et il y a des CAVES. En français, caves ça donne cavernes, ou grottes, mais c'est pas vraiment ça. Pour être plus claire, je dirais que ce sont des temples creusés dans la roche. Ca pourrait être mystérieux s'il y avait moins de touristes. C'est au moins sacré, avec beaucoup de statues de Shiva et de Parvâtî, la femme parfaite. Au fait j'aimerais pouvoir m'expliquer pourquoi la femme parfaite est représentée plus petite que son mari. Mais il ne faut pas poser de questions.

Je pourrais m'y installer, à Mumbai. C'est bien
plus vivable que la plupart des villes d'Inde, et le niveau de vie est plus proche que celui qu'on connaît. Ca paraît superficiel, hein, juger une ville selon son niveau de vie, mais quel plaisir après un long séjour en Inde de soudain pouvoir se balader en ville, prendre un verre sur une terrasse, aller dans un club branché...

Et malgré tout, on croise encore quelques-uns des aspects les plus rudes de l'Inde. Sur le pont qui donne sur le dhobi ghat, fascinant lavoir géant où s'activent des dizaines de laveurs, quelques mendiants nous ont abordés, classique après tout, mais il fallu un bon moment ensuite pour ne plus avoir l'image de cet enfant lépreux aux moignons brandis et au visage déjà ruiné, et son sourire sauvage, celui de quelqu'un qui n'a rien à perdre, collée sur la rétine. C'est sur ce pont d'ailleurs qu'il a fallu donner les bénédictions de départ à Adrien, qui repartait pour la France avec un long voyage Bombay-Delhi-Amsterdam-Lyon.



Par la suite, Marine et moi, battantes toujours, prenons la direction de Malabar Hill pour visiter un magnifique temple jaïn et des jardins qui dominent toute la ville. Et ensuite (attention, révélation mystique !) nous allons voir le CENTRE DU MONDE ! Eh oui, ce lieu sacré, Banganga Tank, aurait été créé par la flèche de Lord Ram qui aurait percé la terre et créé ce bassin, d'où la profusion de temples tout autour.



Bien sûr un peu de shopping s'impose, surtout que deux jours après, c'est Holi, donc il faut se préparer en achetant des poudres de couleurs et des pistolets à eau - c'est un minimum. L'ambiance de fête règne déjà, les mains sont pleines de poudre rose, des enfants préparent les sachets pleins de pigments qui sont vendus tous les vingt mètres (sans exagérer). Et aussi, un sourire suffit à être accueilli et faire partie de la communauté Holi.

Alors finalement, seulement quelques jours à Mumbai, et des tonnes d'expériences nouvelles, dont je n'ai ici retenu que quelques-unes, dans cette ville si différente de ce que nous vivons à Delhi ou pendant nos voyages précédents. "Mumbai vitrine de l'Inde moderne", je confirme sans retenue, même s'il ne faudrait pas nous faire oublier que Dharavi, ce gigantesque bidonville, est à deux pas. En remontant tout Marina Drive en taxi, pour ensuite retraverser Mumbai et ses bouchons pour rejoindre l'aéroport, je longe la mer et je longe aussi des morceaux de vie qui s'alignent, ces familles qui passent l'après-midi sur la plage (mais pas question de sunbathing), ces pêcheurs aux barques échouées sur le sable sale, tous ces taxis qui slaloment vigoureusement, ces jeunes couples qui se baladent main dans la main (quel manque de pudeur !) sur la digue, ce mélange de vêtements traditionnels colorés et hétéroclites avec les vêtements occidentaux supposés branchés, modernes, pratiques, énergiques. En bref, cette étonnante pratique de la rencontre des extrêmes opposés qui est une telle évidence en Inde que ça devient un stéréotype de dire "tout est extrême et contradictoire" se résume avec vigueur ici.

2 commentaires:

  1. Trés joli cet article Gaëlle, j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire. Je poste peu de commentaires mais je lis tous tes articles, et bon, bah chapeau, ta plume m'envoute ;)
    Cool que tu ai aimé Bombay, en même temps, comme tu le décris si bien, ca se comprend aprés avoir passé autant de temps à Delhi et dans le reste de l'Inde !!!
    Continue de nous faire voyager...
    Thi Baï

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  2. Euh, je rectifie: on est pas allé de l'aeroport jusqu'à Colaba en rickshaw, mais en taxi...
    Je garde moi aussi un très bon souvenir de Mumbai (Good morniiiiiiiiiing Mumbai!), du Sea Shore, et du Blue Frog (dont tu gardes jalousement les photos...)
    Jai aimé, peut-être aussi parce qu'on a pu regarder des clips bollywood, que j'ai bronzé d'un seul bras, et que j'ai pas trouvé de courta, malgré 3 bonnes heures de recherche.
    J'ai surtout aimé, parce que j'étais avec Marine.
    J'ai trop aimé, parce qu'il y avait Gaggy avec moi (pas tout le temps, mais bon, qu'on lui pardonne...).

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