Et maintenant, je suis ici :

mercredi 15 juillet 2009

« Oh yeah, dat’s de day you cut your king’s head off, right ? »


« Euh oui… Enfin nan ! Non en fait c’est pas ça, tout a commencé avec la famine et les problèmes économiques… Mais même plus que ça, ça faisait longtemps que les inégalités n’étaient plus… Après y’a eu la réunion des Etats généraux et les cahiers de doléances… Ah oui mais comment on dit « doléances » ? Euh… Et donc en fait le roi n’a été tué que bien plus tard… Pourquoi on a attendu aussi longtemps ? Huh… Bah euh les changements se sont… You know… Oha forget it, oui en fait on va dire que c’est ça ».

National day. Ce 14 juillet prend encore plus de sens quand on est loin de la France. Non pas que je saisisse mieux la portée symbolique de la prise de la Bastille et de ses conséquences sur la société et les mentalités françaises ; mais, tout simplement, ce jour de fête porte à lui seul un système de valeurs purement françaises. Soudain, fêter le 14 juillet, ou prétendre le célébrer avec ferveur, c’est faire partie du microcosme français, une aiguille dans la gigantesque botte de foin indienne. Alors on accepte l’invitation de l’ambassadeur, on se précipite à Chanakya Puri, le quartier des ambassades, pour entrer dans ce bâtiment peu attrayant en temps normal mais ce soir-là revêtu de ses habits de fête, et prendre une grande bouffée d’air fr-anç-ais. Il faudra se passer de feu d’artifice, ce qui sans doute provoquerait un pincement au cœur à n’importe quel Français. Mais on se console devant le gigantesque buffet garni en énorme majorité de charcuterie, de pain, de fromage, qui sont bien sûr la base de l’alimentation française et manqueraient à n’importe quel Gaulois expatrié. Les Indiens invités à la soirée s’approchent, circonspects, du buffet. Ils font un détour pour s’éloigner des plateaux de charcuterie, examinent le fromage avec réticence puis s’en servent une pleine assiette, et carburent au « French champagne » pendant toute la soirée. Tant et si bien qu’il n’y en aura pas assez pour tout le monde ; et je fais partie des Français lésés.

Pour ce qui est des Indiens, bien sûr, on peut en rencontrer pendant cette soirée. Mais ces Indiens-là, ils sont triés sur le volet. Ils travaillent avec l’ambassade, ou alors ont des amis français, ou collaborent d’une façon ou d’une autre avec la France. Parce qu’on ne ferait pas venir n’importe qui au saint des saints de l’Ambassade de France. Alors il ne s’agit que de couples extrêmement élégants, de saris brodés de perles, de bijoux chatoyants, de sourires aimables, de conversations en langues multiples. L’Inde d’en-dessous tente quand même de se faire sentir, ou doit se faire sentir. Ce sont des Indiens qui tiennent les buffets et servent les plateaux en passant à travers une foule grouillante, riante, sentant le champagne et le saucisson. Avec ces Indiens et ces Français, il y a aussi des représentants des ambassades voisines, et même des gens tout à fait incongrus, comme une Thaïlandaise faisant une démonstration d’arts martiaux (ne me demandez pas lesquels) au milieu de la piste de danse, au risque de révéler ses sous-vêtements aux regards impudiques, ou des militaires débridés, à la nationalité indéfinissable (« Non mais, ils sont vraiment français ?! ») investissant les hauts lieux de la soirée : buffet et piste de danse.

Ainsi, tout ce beau monde se réunit sur un seul prétexte, celui de la fête nationale française. Pendant ce temps, un peu plus loin sur le globe, Paris se prépare à accueillir Manmohan Singh, le chef du gouvernement indien, et plusieurs unités de l’armée indienne pour le très fameux défilé des Champs-Elysées, sous l’œil attentif du très réputé Nicolas Sarkozy - souvent assimilé, pour l’apparence et les mimiques, à Mister Bean. Following the French way, on danse assidûment sur des rythmes français. La sélection française, c’est quand même, il faut le dire, un DJ capable d’enchaîner, à la fête de l’ambassade, « Gare au gorille », Edith Piaf et un extrait de la chanson de Gainsbourg, « Je vais et je viens entre tes reins… »… Tout cela avant de repasser cinq fois de suite « L’aventurier »… Mais qu’importe, on rit on danse, et « on se beurre le museau » tous ensemble, oubliant pour quelques heures qui filent comme des étincelles que dehors, juste là, après le poste de contrôle, c’est l’Inde la vraie, l’Inde la dure.


















































1 commentaire:

  1. Nous, le feu d'artifice du haut de Fourvière a été annulé!
    J'ai enseigné a trois americains la danse de la boite! Proud of myself!
    J'ai coupé des pommes aussi, et puis j'ai pensé a toi toute la journée après ton appel, z'etais trop heureux de t'entendre!
    J'pense fort a toi, ma française lésée de pas avoir eu de champagne! A Chalon, je trinquerai a ta santé! Bisous du Mushu enragé!

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